27Mai, 2019
D’après des textes de Jakez Cornou et de Fabienne Wolf. Dessin d’Hervé Le Gall
Herve de Portzmoguer (Capitaine de la Cordeliere)
La vie de Hervé de Portzmoguer
Le lieu de Portzmoguer a sans doute donné son nom à la famille noble de Portzmoguer.
La famille de Portzmoguer, nom purement breton, (de portz, port et moguer, mur), comptait au moins deux branches, celle de Ploumoguer et celle de Plouarzel. Hervé appartient certainement à la famille des Portzmoguer de Plouarzel.
Blason de la famille de Portzmoguer
Hervé est probablement né vers 1470. Fils de Jehan de Porsmoguer et de Marguerite Calvez, il aurait eu un frère cadet, Guillaume, époux d’Amisse de Kermorvan, qui aurait continué la filiation. On suppose qu’il aurait eu également une sœur, Catherine.
Marié en première noce à Jehanne de Coatmanarch, fille de la maison de Coatjuval en Ploudaniel, il n’aurait pas eu d’enfant.
Veuf, il épouse en deuxièmes noces Françoise de Kergoulouarn, originaire de la sénéchaussée de Lesneven. De cette union naissent deux enfants Yvon et Anne.
Pirate ou Corsaire
Hervé de Portzmoguer était-il un pirate? Un mandement du 9 juin 1506 tendrait à nous le faire penser. «Mandemant de justice et evocation au Conseil pour Jehan et Robert Abretons, frères, et Georges Yvon, marchans frequantans la mer, du royaume d’Escoce et de la nation d’iceluy: icelui mandement adreczé aux juges de Rennes, Nantes, Treguer et autres, de faire enqueste et informacion de plusieurs pilleries leur faictes par Porzmoguer et autres; et ceulx qui seront trouvez chargez, les rendre prisonniers au Bouffay de Nantes; ou les ajourner à comparoir en personne et par arrest audict conseil».
Hervé de Portzmoguer était-il un corsaire? Une ordonnance de louis XII datant du 17 août 1503 et étant de « Loys, par la grâce de dieu, roy de France», organisant le convoi pour la protection des côtes bretonnes, ordonne à Portzmoguer d’embarquer avec 300 hommes sur quatre navires « Le capitaine Promoguer a sa bande, avec quatre navires par estimes trois cents hommes». Dans cette ordonnance, Hervé est le seul capitaine désigné, Portzmoguer jouit d’une telle réputation que le roi de France a du entendre parler de ses hauts faits d’armes sur mer.
Etait-il corsaire ou pirate? Il était en tout cas redouté sur mer. Cette renommée est confirmée dans les grandes Chroniques de Bretagne lors d’un récit de combat naval qui se déroule après la mort d’Hervé «En cet assault et bataille y avait grand deffault du Capitaine Primoguet, car entre tous les autres il estait craint et redoubté sur mer, tant des Anglais que des Espagnols».
Capitaine de la Cordelière
Hervé de Portzmoguer, alors qu’il n’était pas encore capitaine de la Cordelière, avait été desservi auprès de la duchesse par des jaloux. Averti par des amis, Hervé indigné aurait dédaigné venir se justifier auprès d’Anne de Bretagne lors du voyage de celle-ci dans son duché en 1505 et prit la mer. La reine de France le fit alors chercher pour lui parler. Hervé sortit triomphalement de cet entretien, la reine avait été convaincue de sa loyauté et lui avait confié la Marie Cordelière. La reine «incontinent retourna audict lieu de Folgouet pour aller à Sainct Pol de leon, car estoit proprement son chemin, & est le dit Sainct pol evefche & port de mer, auquel lieu le capitaine Primoguet se tenoit: mais pour lors il avait equippe les navires & tenoit la mer, pource que aucuns envieux avoyent donne entendre quelques parolles non véritables à la dicte dame…»
D’après des textes de Jakez Cornou et de Fabienne Wolf. Dessin d’Hervé Le Gall
27Mai, 2019
Le manoir d’Herve de Portzmoguer
Le Manoir breton
Le manoir d’Hervé de Portzmoguer
Un raid effectué sur les côtes bretonnes en mai 1512 par les soldats du roi d’Angleterre Henri VIII eut pour mission de détruire le manoir d’Hervé de Portzmoguer en représailles du préjudice causé par son propriétaire aux vaisseaux anglais de commerce.
La famille de Portzmoguer se replie alors sur le manoir voisin de Kermarc’har (ou Kervalhar).
Structure générale du manoir
D’une manière générale le manoir breton se situe à la campagne.
Son autonomie est préservée par une cour close cernant le logis principal, les dépendances diverses et un haut mur défensif.
L’accès à la cour se fait par une porte piétonne et une charretière. Cet enclos fait fonction de défense même limitée.
Quelques meurtrières disposées au portail d’entrée et à quelques autres points stratégiques donnent une impression plus grande de sécurité aux gens réfugiés à l’intérieur.
La tour de guet
Un escalier à vis permet d’accéder aux différentes pièces du manoir. Il est généralement placé dans une tour implantée à l’avant ou à l’arrière du logis principal. Il peut servir de tour de guet dans le cas d’un manoir fortifié.
Le moulin
Le seigneur avait la possibilité d’établir un ou plusieurs moulins sur un ruisseau proche. Le moulin joue un rôle important dans l’économie du manoir. Des bassins liés au travail du lin et du chanvre pouvaient être associés au moulin.
Le colombier
Le colombier est le symbole par excellence de la demeure seigneuriale. La coutume de Bretagne précise: qu’il n’est permis à aucun de faire colombier s’il n’a trois cents journaux de terre pour le moins en domaine noble aux environs de la maison en laquelle il veut faire le dit-colombier.
La métairie
Le propriétaire du manoir soucieux de mettre ses terres en valeur en confie l’exploitation à un « métayer ». L’exploitant s’installe à la « métairie », ensemble de bâtiments de ferme situés à proximité immédiate du manoir.
La chapelle
Seules les grandes demeures seigneuriales possédaient une chapelle à l’intérieur de l’enclos ou à ses environs immédiats. Le petit manoir en était généralement dépourvu.
27Mai, 2019
La Cordeliere
La Cordelière a été construite le 30 juin 1498 à Morlaix par l’armateur Nicolas Coatanlem, seigneur de Keraudy, principal lieutenant et neveu de Jehan de Coatanlem, célèbre pirate breton. Elle aurait coûté « 22512 livres, 9 sols, 2 deniers ».
Type de bateau
Descendant en ligne directe de la nef, la Cordelière était une caraque. Elle devait mesurer environ 40 mètres de long et jauger 700 tonneaux. La caraque est construite comme une forteresse. La hune est un poste de combat, une sorte de tour, de laquelle combattent plusieurs soldats. Le poste d’observation est situé au-dessus de la hune: c’est le nid de pie. Elle possède deux châteaux élevés au cours des ans de plus en plus haut. Trois, quatre, et même cinq mâts se dressent sur la caraque, ce qui entraîne bien sûr un grand changement dans la voilure: aux grands-voiles carrées et aux voiles latines à antennes, on rajoute la voile de hune, les bonettes latérales puis plus tard, le perroquet.
A l’époque des caraques, on reproduit exactement sur mer le même combat que sur terre.
Equipage
La Cordelière était organisée sous le système du double équipage. il y avait d’une part les marins, commandés par le maître de la caraque « Martin le Naux », chargés de tout ce qui concerne la maneuvre, l’entretien du bateau et d’autre part, le deuxième équipage constitué d’une unité de soldats commandée par un capitaine « Hervé de Portzmoguer ». L’équipage devait être composé d’environ 800 matelots, une cinquantaine de canonniers, et une centaine d’arquebusiers et archets.
Il y avait de plus 300 gentilshommes de la famille d’Hervé à bord au moment du combat.
Vie à bord
Près de mille marins et soldats réunis dans un espace resserré, soumis aux même risques, vivant dans une intimité quotidienne. Est-il besoin de dire que leur vie devait être très dure ? Un matelot qui n’était pas de quart ou ne participait pas à la manœuvre des voiles ou des ancres devait rester dans la batterie. C’est là qu’il mangeait, assis par terre ou peut-être sur son coffre, c’est là qu’il dormait, à même le pont, et c’est là qu’il luttait pour sa vie au cours des combats.
Bouillies, céréales, haricots ou pois secs, biscuits, viandes salées, lard, poissons séchés ou salés, tel devait être l’univers monotone de l’équipage. Le matelot devait manger dans la pénombre, à côté des canons, dans une assiette en bois ou un bol de terre cuite, avec pour couverts les doigts, une cuillère en bois et son coutelas. On ne devait servir que rarement des aliments frais.
Le Bateau
On doit se contenter d’approximations tant les informations sont peu précises et rares
Tonnage: 600 à 700 tonneaux
Longueur: 40 à 60 mètres
Largeur: 10 à 12 mètres
La coque:
La coque est à « francs-bords » c’est à dire que les planches d’habillage sont jointives et non à « clins » comme sur les bateaux scandinaves ou les caravelles ibériques.
Les châteaux:
Les châteaux arrière et avant sont très hauts par rapport au pont et en surplomb sur au moins 2 niveaux. Ils sont percés pour laisser place à l’artillerie.
Les espars:
Sorte de charpente recouvrant les ponts durant les combats (pont du château avant, pont principal, pont du gaillard arrière, pont de la dunette.
Ces charpentes étaient recouvertes d’une bâche ou d’un filet de protection contre les projectiles adverses.
Une partie du pont n’était pas couverte par « les espars », afin de faciliter les manœuvres.
Les hunes:
Souvent protégées par un filet, les hunes étaient équipées d’une artillerie légère (mousquets) et possédaient une réserve abondante de pierres et javelots, que les défenseurs (parfois 25 par hune) propulsaient sur les assaillants.
Les pavois:
Les pavois ou écus étaient fixés au bastingage pour se protéger des projectiles adverses.
Les mantelets:
Ce sont des panneaux destinés à fermer les sabords.
Les sabords:
Ouverture dans la coque (ou muraille) et dans les châteaux, destinée au passage des fûts de canons.
La Cordelière fut un des premiers bateaux à être équipé de sabords.
Les sabords auraient été inventés en 1500 par l’ingénieur Brestois Descharges.
Sabord de batteries: sur la muraille du navire.
Sabord des châteaux: avec des canons de petit calibre.
Sabord de chasse: sur le château avant avec des canons de petit calibre.
Sabord de retraite: sur le château arrière avec des canons de divers calibres.
Les sabords de la première batterie étaient articulés par des charnières.
Les sabords de la deuxième batterie n’étaient pas articulés.
L’artillerie
La Cordelière pouvait être armée de 200 pièces de toutes catégories, servies par 50 canonniers et 150 arquebusiers.
16 gros canons: les plus lourds étaient sans doute installés aux ponts inférieurs, 1ère et 2ème batteries.
14 bombardes installées en 2ème batterie et aux ponts supérieurs.
Les faucons, serpenteaux, scorpions, basilics, crapaudeaux, couleuvrines, gros vers et autres engins, aux noms souvent empruntés à un animal symbolisant l’épouvante que l’on attend d’eux, étaient placés un peu partout sur le navire.
Les pierriers à brague, fauconneaux, mousquets et petites bombardes munies de fourches à pivots et tourillons, équipaient les hunes, le bastingage et les sabords des châteaux.
D’après des textes de Jakez Cornou et de Fabienne Wolf. Dessin d’Hervé Le Gall
27Mai, 2019
D’après des textes de Jakez Cornou et de Fabienne Wolf. Tableau de Pierre Julien (1882).
le combat
Dans la soirée du 9 août 1512, il y avait à bord de la Cordelière de nombreux invités, nobles dames et gentilshommes bretons, quand les postes d’observation, échelonnés le long de la côte, signalèrent l’approche soudaine d’une grosse flotte anglaise. Pour ne pas se laisser enfermer dans la rade de Brest, la Cordelière appareilla immédiatement avec les autres bâtiments du vice-amiral René de Clermont, sans avoir eu le temps de débarquer ses invités.
C’était le 10 août 1512. Il était environ midi, Howard, pour nous accrocher avait forcé la voilure; la Marie-Rose, qu’il montait, accabla de boulets la Louise, qui battait pavillon amiral René de Clermont, et la força à se sauver au milieu des roches. Autour de la Cordelière, tournent comme des « toupies » la Marie-James de Thomas Ughtred, le Sovereign de Charles Brandon, duc de Suffolk, et le Régent du grand écuyer Thomas Knyvet.
Portzmoguer se débarrasse des premiers par des bordées bien dirigées, puis se jette sur le dernier, « comme le chien se joue du lièvre quand il le tient aux dents ».
L’Amiral Howard n’avait pas moins de 51 bâtiments, dont moitié étaient des transports. René de Clermont n’en avait pas plus de 21. Devant cette inégalité de force, il quitta son mouillage entre la pointe Saint-Mathieu et celle du Toulinguet, pour se replier dans le goulet de Brest; la Louise et la Cordelière couvraient la retraite de l’Escadre française.
La Cordelière a jeté ses grappins sur le Regent. Mais c’est elle qui subit l’attaque à l’abordage de ses adversaires, bien supérieurs en nombre et vigoureusement menés par le baron de Winchelsea.
Enveloppé de toutes parts par la flotte anglaise, Portzmoguer se rend compte, en montant dans la hune, qu’il n’a plus aucun secours à attendre: ses « conserves », dont il a protégé la retraite, disparaissent dans le goulet de Brest…
Tant que dure le duel d’artillerie, les canonniers restent seuls sur le pont, tapis derrière des balles de laine dont ils se couvrent après chaque décharge; le pont de corde tendu au-dessus de leurs têtes amortit le choc des projectiles que les gabiers ennemis font pleuvoir de la hune, où une cloche treillissée les abrite eux-mêmes. Il faut attendre que la trompette sonne, pour que les quatre compagnies d’abordage montent de l’entrepont, en laissant chacune derrière elles une section de réserve. Sous les ordres du «capitaine de dessoubz», charpentiers et calfats se tiennent attentifs à aveugler les voies d’eau et à passer aux combattants les projectiles de la soute. Telle est la justicieuse tactique que l’amiral de Louis XII, Philippe de Clèves, a enseignée à nos marins.
Mais que pouvaient les marins de Portzmoguer contre la pluie incendiaire des aspergès et des lances à feu évasées comme des trompes, contre les grenades explosives au pétrole ou les oranges ardentes à l’eau de vie, au soufre et au salpêtre, qui pleuvaient des gaillards du Regent.
Tout à coup, une détonation épouvantable retentit. La sainte-barbe de la Cordelière venait de sauter.
« Petius mori quam foedari »: les Bretons avaient préféré la mort à la capitulation. Et ils entraînaient leurs adversaires dans l’abîme. Le Regent brûlait comme un fétu; Knyvet avait été tué ; 3 de ses cannoniers sur 100 échappèrent. Ughtred comptait 90 tués et blessés à bord de la Mary-James. Mais des 1250 hommes, marins, soldats et invités que portait la nef de Morlaix, le feu n’épargna qu’une vingtaine de personnes.
D’après des textes de Jakez Cornou et de Fabienne Wolf. Tableau de Pierre Julien (1882).
12Déc, 2018
Fanch Gonidec, grand gaillard de Penmarch et capitaine du navire est satisfait.
Les ordres se succédaient, les manœuvres bien rodées, l’entrée de la baie de Morlaix exigeait une bonne concentration, mais le Capitaine la connaissait comme le fond de sa poche.
L’epave Imaginaire de la Cordeliere
Terre…Terre….
Au lever du soleil, à bord de BIRVIDIC on commence à distinguer les contours caractéristiques de l’île de batz. Nous sommes en mai 1496, la petite CARAVELLE de soixante tonneaux, poussée par une brise de nord-ouest progresse à 4 ou 5 nœuds sur une mer légèrement formée.
Fanch Gonidec, grand gaillard de Penmarch et capitaine du navire est satisfait.
Depuis BRISTOL, les cales chargées de plomb et de chaux, les conditions de navigation ont été parfaites et quelques jours d’escale à MORLAIX ne lui déplaisent pas.
«J’ai préparé des galettes de blé noir avec du lard !»
C’est Loïc le moussaillon de 15 ans et neveu de Fanch qui se manifeste.
«Bon, puisque c’est comme ça, vous pouvez percer le tonneau de vin de Bordeaux que j’ai en réserve»
Le capitaine Fanch savait récompenser son équipage. C’est ainsi que l’ambiance du bord était sereine et sympathique, à tel point qu’il n’avait que l’embarras du choix pour sélectionner ses matelots, tous issus de la même région.
« Alors Fanch, après MORLAIX, tu nous amènes en GALICE parait-il ?»
«Si tout va bien, on va charger des toiles, du blé et des cordages pour les livrer à BAÏONA»
«BAÏONA, tu connais ?»
«Pour sûr, avec mon père, j’y suis allé souvent et la dernière fois en 1493, on y a même rencontré MARTIN PINZON qui rentrait des Indes occidentales sur la PINTA. Demandez à Gwénolé, il y était aussi, il doit bien se souvenir de la fiesta préparée par les Espagnols»
Tous à vos postes, on approche du plateau des DUONS.
Ferlez les voiles hautes.
Préparez le mouillage
Les ordres se succédaient, les manœuvres bien rodées, l’entrée de la baie de Morlaix exigeait une bonne concentration, mais le Capitaine la connaissait comme le fond de sa poche.
AR BEG LEMM, l’île aux dames, Le Corbeau, Le Taureau, les roches et les îlots défilent lentement.
On va mouiller au DOURDUFF en attendant la renverse.
«Regardez moi ça les gars !»
Au fond de l’anse, un énorme squelette de poutres enchevêtrées domine tout le chantier naval. IMPRESSIONNANT !
Montroulez (1) Mai 1496
« OH !! Capitaine Gonidec…ça alors » !
Fanch venait tout juste de quitter les ruelles du faubourg St-MATHIEU après avoir longuement marchandé des « crées » (2) chez Joseph Le Duff, un Juloded (3) très dur en affaire celui là.
De dos Yann Le Cornec avait tout de suite reconnu la stature imposante de Fanch, son ami d’enfance. « Ça fait au moins douze lunes que je ne t’ai pas rencontré… Comment vas-tu? »
Yann était le fils d’un petit paysan de la région de Pont-L’Abbé à quelques lieues de Penmarc’h, là où justement Fanch avait vécu chez ses grands-parents.
« En ce moment, je n’ai pas le temps de m’ennuyer, je transporte du fer jour et nuit pour le chantier de la nef de la reine au Dourduff. »
Après avoir traversé le Jarlot sur un petit pont de bois, les deux compères contournent la place des Jacobins et constatent, sans se concerter, que leur gosiers respectifs se sont assèchés.
« Allons chez Perrine dans la venelle aux prêtres, tu verras, elle est toujours très accueillante et on y mange très bien aussi. »
Fanch était un habitué des lieux et ce cabaret représentait son principal amer dans la ville de Morlaix.
« Alors, mon beau marin, décidément Fanch, tu ne peux plus te passer de moi. »
Vêtue d’un corselet sans manches sur une chemisette de toile blanche, le chignon bien haut, la petite Perrine était plutôt avenante et savait fidéliser la clientèle de la taverne.
Yann et Fanch s’installèrent au fond de la salle, à l’opposé de l’imposante cheminée où Léon le patron s’affairait autour des marmites.
« Mais où vas-tu chercher le fer ? »
« Aujourd’hui, j’arrive de la forêt de Quenecan où se trouvent les forges des Salles. Elles appartiennent à la famille de Rohan et le fer qu’ils produisent est de très bonne qualité; rien n’est trop beau pour la Reine. »
Les deux amis, heureux de se retrouver, dégustèrent un excellent jarret de veau accompagné de choux, de carottes et du fameux » EDDU » (4); bien entendu, arrosé de plusieurs pichets de vin de Bordeaux.
« Et toi Fanch, que fais-tu en ce moment ? »
« Je viens tout juste de conclure mon dernier marché de toiles et dans trois ou quatre jours j’appareille pour l’Espagne avec une belle cargaison. »
Aux escales, sous les ordres de Gwénolé son fidèle second, l’ensemble de l’équipage était mobilisé pour réceptionner et ranger les marchandises dans les cales du navire.
« Demain je te propose de m’accompagner au Dourduff pour livrer mes lingots de fer et visiter le fameux chantier. Avec un peu de chance, je vais pouvoir te présenter à Nicolas Coatenlem, tu le connais peut-être ? »
« Pas personellement, je ne l’ai jamais rencontré mais ça me ferait vraiment plaisir de saluer ce fameux marin, sa réputation n’est plus à faire. »
« Salut Fanch et à demain, place St Nicolas à l’aube« ! Après avoir longé l’église St Melaine en chantier, le capitaine Gonidec, retrouve son Birvidic la quille dans la vase mais bien appuyé contre le petit quai du Dossen.
Hue César ! Aventi Brutus
Lentement les deux chevaux de l’attelage se mirent en mouvement et le chariot à quatre roues, lourdement chargé, s’ébranla sans heurt.
Vraiment, Fanch Gonidec ne put s’empêcher de « charrier » son ami :
« Palsambleu, Yann, tu as fait beaucoup de progrès en latin »
« Rappelle toi de mon frère aîné, Tugdual, il était toujours fourré chez les curés. Eh bien voilà, il est devenu moine à l’abbaye du Relecq. Il est en permanence plongé dans des livres écrits en latin et c’est lui qui a baptisé tous mes chevaux avec des noms d’empereurs romains ».
De toute évidence Yann Le Cornec s’était bien débrouillé; il possédait maintenant une petite entreprise de charroi armée de trois chariots modernes à semi braquage et de sept chevaux puissants de belle race guidés par trois jeunes équipiers dynamiques.
De villages en hameaux, sur un chemin cahoteux, et parfois pentu, voici notre équipage au bourg de Plouézoc’h prêt à amorcer sa descente vers Brignonic et Dourduff. « Encore une demi lieue et nous y sommes, mais je pense que c’est sans doute la dernière fois que j’emprunte ce chemin ».
En effet, afin d’améliorer le transport des matériaux et des marchandises vers le grand chantier de la nef, un morlaisien nommé Pol Coroler avait eu l’idée de construire deux grandes barges. Ces dernières allaient permettre de faire le va et vient entre Morlaix et Le Dourduff à marée haute tout en profitant du flot dans un sens et du jusant pour le retour.
Droit devant nous, voici la colline de Trégonezre et tout en bas c’est le Dourduff, « j’espère que tu n’as pas trop mal aux pieds, toi le marin ».
« Ne t’inquietes pas pour moi, je suis très bien chaussé. Regardes bien ces galoches, elles viennent du pays de Galles et crois moi: elles ont été faites sur mesure par un maître artisan de renom. Il est vrai que sur mon bateau, je ne les use pas souvent »!
Légèrement décalées par rapport à la grève, les forges du chantier étaient partiellement masquées par de nombreux tas de charbon de bois et un amoncellemen
Et voilà encore un repas qui s’annonce bien.
« Gonidec…heu…Gonidec…ce nom là me dit quelque chose.. »
Yann Le Cornec venait tout juste de présenter son ami Fanch à Nicolas COATENLEM, le maître des lieux.
«Si, je m’en souviens maintenant, j’ai rencontré un certain Mathieu Gonidec au cours d’une bordée dans le port de La Corogne..Oh !.il ya bien une quinzaine d’années de celà.. »
Enchanté d’avoir une si belle entrée en matière face à un homme qu’il admirait, Fanch lui précisa :
« Vous avez probablement croisé mon père, il a beaucoup navigué vers l’Espagne et devait commander à l’époque la Marie-Jeanne. »
«Exactement, La Marie-Jeanne et Mathieu son capitaine natif de Penmarc’h ; nous avions escorté cette année là toute une flottille de barques marchandes pour la traversée du golfe de Gascogne. A l’époque j’étais le second sur le bateau de mon oncle Jehan juste avant qu’il ne soit embrigadé par les Portugais. Au fait comment va-t-il ce Mathieu ?»
Après avoir longtemps bourlingué du nord au sud, Mathieu Gonidec s’était installé dans une petite maison sur le port d’Audierne. Il en partait très tôt le matin avec un matelot sur une petite barque pour mouiller ses nasses et ses filets au large du plateau de la gamelle.
C’est avec fierté et sans se faire prier que Nicolas Coatenlem assura une visite détaillée du chantier de la Maréchale, se permettant au passage de conseiller ou de critiquer les charpentiers en action.
«La semaine dernière nous avons achevé la pose de toutes les membrures sur la quille et juste à côté nous avons installé les deux étuves qui nous servent à former les bordés.»
Toutes les membrures étaient maintenues en position par des lattes provisoires, elles-même fixées sur une fausse poutre longitudinale que les spécialistes appelaient « l’ANE ».
Cet ANE (malgré son nom) jouait un rôle important dans la construction : c’est lui qui garantissait la symétrie du navire et la régularité des espacements entre les membrures.
De chaque côté du squelette les deux équipes de charpentiers juchées sur des plates-formes, positionnaient la préceinte de plat-bord encore fumante et par un système ingénieux de bouts et de leviers les compagnons de l’intérieur déformaient la planche pour que les ouvriers extérieurs puissent la clouter sur la membrure.
Un peu plus loin, des établis, des chevalets, parfois protégés par des cahutes étaient installés sur la partie haute de la grève et tout autour se démenait une nuée de charpentiers affairés.
Les gouges, les vrilles, les haches faisaient voler les copeaux. Les scieurs de long, deux par deux chantournaient les futures virures.
L’herminette maniée avec dextérité sculptait l’extrémité d’un barrot pour s’ajuster par la suite sur la bauquière.
Quelle activité !
Le bras tendu, Nicolas Coatanlem fit un tour sur lui-même
«Nous avons recruté les meilleurs charpentiers du grand ouest et j’espère que la Reine sera satisfaite du travail.»
«De plus, il nous faut prouver que nous sommes meilleurs que les Nantais ! »
Anne de Bretagne, pour étoffer la flotte Française de Charles VIII, avait décidé de faire construire deux autres caraques dans le chantier du port aux vins de Nantes, le financement de l’opération étant assuré par une levée d’impôts exceptionnelle…plutôt mal digérée par les Bretons.
« Alors Capitaine Gonidec… Que pensez-vous de mon nouveau jouet ? »
« Il est vraiment impressionnant ! Sa carène me semble bien taillée pour fendre les flots, mais j’ai beaucoup de mal à imaginer la nef dans son ensemble avec ses mâts, ses hunes, ses voiles… »
« Venez, venez, je vais vous dévoiler mes secrets… suivez –moi. »
«C’est par là…»
Yann et Fanch quittèrent la Palud et suivirent Nicolas Catenlem vers la petite maison en granit qui lui servait de cabinet de travail.
«Juste une petite recommandation avant d’entrer : La personne qui se trouve à l’intérieur est un petit peu spéciale, surtout ne la contrariez pas et ne manquez pas une occasion de lui rappeler qu’il est le meilleur et le plus intelligent…. même si vous ne le pensez pas…»
«Ah ! C’est vous Nicolas !»
«Oui, je te présente deux visiteurs Bigoudins, Yann Le Cornec que tu connais déjà et Fanch Gonidec, le capitaine du Birvidik ».
Tout souriant, le petit homme au lorgnon pendouillant leur tend une main amicale.
«Alain Mathurin Pierre De Kermadec du Morbihan…. pour vous servir»
«S’il vous plait Monsieur De Kermadec, pouvez-vous leur donner un petit aperçu des caractéristiques finales de la nef de la Reine à partir des plans que vous avez si brillamment conçus ».
«Le terme est bien faible….»
Avec moult détails à l’appui, la présentation dithyrambique du sieur De Kermadec dura plus d’une heure
700 tonneaux, 120 pieds de longueur, 32 pieds au maître-bau, 12 pieds de tirant d’eau. Une carène bien effilée protégée et renforcée ça et là par quelques porques, 2 gaillards surélevés, trois mats, un beaupré équipé d’une sous barbe, 2 grands huniers, des nids de pie, des sabords pour recevoir des gros canons. Les tracés présentés par l’architecte naval étaient soignés et comportaient de nombreuses annotations.
Fanch et Yann suivaient avec la plus grande attention les explications du sulfureux Alain Mathurin Pierre.
«Eh bien, bravo monsieur de Kermadec, votre étude est remarquable»
«Le terme est faible…. Mais vous n’avez pas encore tout vu.. puisque c’est le chef Nicolas qui vous a invité je vais me permettre de vous présenter un véritable chef-d’œuvre… fabriqué de mes propres mains.»
De Kermadec se dirige alors vers l’étagère, se saisit d’un objet protégé par un morceau de tissu écru, un peu poussiéreux, et le pose sur la table de travail.
Délicatement il soulève le voile et découvre une superbe maquette représentant la future caraque.
«Lors des premières esquisses, j’étais en concurrence avec une autre équipe que je qualifie de ( MAUVAIS )… c’est pourquoi je me suis sérieusement appliqué pour réaliser cette maquette afin de décrocher le contrat ».
«Il ne me reste plus qu’à terminer la fabrication des haubans ».
«C’est une merveille !!!»
«Le terme est toujours faible.. Ah oui ! encore une innovation personnelle».
Et c’est reparti… Il est vraiment intarissable ce gars là !
A la sortie de la maison, Yann et Fanch furent interpellés par Nicolas Coatanlem.
«Alors, les amis, votre lanterne a-t’elle été bien éclairée par Monsieur de Kermadec ?»
Fanch lui répondit :
«Nous avons fortement apprécié la prestation de votre collaborateur et pour suivre vos conseils nous l’avons congratulé en lui disant qu’il frôlait parfois le GENIE.»
«Et que vous a-t’il répondu ?»
«Le terme est faible…tout simplement…»
De franches poignées de mains, des tapes sur l’épaule, Nicolas Coatanlem prend congé de ses hôtes.
«Voilà, je vous souhaite bon vent et si un jour vous passez par le manoir de PENANRUE…mandez-moi, n’hésitez pas».
«Il me plait bien ce COATANLEM…»
War Zouar !
Debout sur l’avant de la chaloupe, le jeune homme fringant bondit sur la table de Berthaume suivi de près par son fidèle lieutenant.
Nous sommes à Plougonvelin, à l’extrême ouest de la pointe Bretonne, le 23 mai 1501, 9 heures du matin.
« Quelle belle journée ! N’est-ce pas Capitaine ? »
« Je t’en prie Erwan, nous ne sommes plus à bord du Pen-Kalet, laisse tomber les galons veux-tu. »
Hervé de Portzmoguer et Erwan Kergariou, plutôt rêveur, regardent s’éloigner le canot. A quelques encablures, le navire à l’ancre depuis la veille s’apprête à appareiller vers Brest pour y subir un carénage, changer quelques bordés, réviser la mâture et réceptionner de nouvelles bombardes.
En l’absence d’Hervé de Portzmoguer le commandement du navire était confié à Maître Le Rouzic, un homme d’expérience et de confiance.
Tout en longeant la grève du Trez-hir à pied nos deux marins peuvent apercevoir la caravelle manœuvrer et prendre lentement la direction du Minou.
« Il a fière allure ton navire… »
« Je n’en suis pas mécontent, il est rapide, raide à la toile et de plus, au combat il se comporte bien. »
« C’est peut être la qualité du Capitaine qui fait la différence… »
« N’exagère pas Erwan, cette fois, c’est tout l’équipage qu’il faut féliciter pour la capture de Mickaël Blackson cet horrible pirate. »
Quelques pas plus loin.
« Tiens, voilà le ribinou qui mène tout droit à Kervénoc chez Yffic »
Palefrenier réputé dans la région, Iffic bergot, non seulement élevait des chevaux de traits pour les paysans, mais aussi des doubles bidets issus de croisements entre la race bretonne et des étalons pur-sang anglais très appréciés des cavaliers.
« Tiens Hervé, celui-va te convenir, il a le même caractère de cochon que toi… il s’appelle Platoche… »
Erwan, lui, hésita longuement et finalement opta pour un magnifique destrier prénommé Zizou.
« Dis moi Iffic, je me demande toujours comment tu choisis le nom de baptême de tes chevaux… »
« Est-ce que je te demande si un marin sait monter sur un cheval ?.. »
Allez Hue.
Hervé et Erwan empruntèrent la voie romaine qui mène à St Mathieu en passant par Saint-Jean, Pen ar prat, Kériel.
« Ici on tourne à droite direction Kéringar »
Hervé de Portzmoguer tenait absolument à saluer ses amis Lucienne et Georges.
Ils furent accueillis sous le porche par les aboiements de la chienne et par Yann, un petit blondinet à peine âgé d’une dizaine d’années.
Hervé, tout jeune faisait souvent le trajet entre Plouarzel et Plougonvelin pour séjourner chez ses oncles et tantes, et à chaque fois, le petit détour par Kéringar s’imposait, il s’y sentait si bien.
Les retrouvailles furent chaleureuses.
Comme à chacun de ses passages, Lucienne l’invita à déjeuner et comme d’habitude le gros poulet embroché dans la cheminée était doré à point.
Hervé, sollicité par Georges, le vin aidant, ne se fit pas prier pour décrire en long, en large, ses aventures maritimes, les attaques, les abordages, les tempêtes, mais aussi les castagnes dans les ports…avec les Anglais, les Espagnols où les Portugais.
Le petit Yann, tout ébahi, les yeux écarquillés, ne perdait pas une miette du récit de celui qu’il appelait familièrement tonton Hervé.
Assurément, une vocation était en train de naître.
« Je ne m’ennuie pas ici mais je dois absolument passer au Conquet pour organiser mon prochain convoi.. »
Lucienne, Georges, Yann virent disparaître les deux cavaliers derrière les taillis qui masquaient le chemin de Milin Avel.
Le bras encore levé, Georges se retourna en soupirant :
« Il a toujours eu le feu aux fesses ce gamin là…décidément il ne changera pas.. »
Plus tard, Hervé et Erwan mirent pied à terre à l’entrée du Conquet sur la corniche qui domine la ria. De là ils pouvaient discerner dans le lointain le chapelet d’îles de Quéménes à Ouessant en passant par Molène.
« La pointe du Corsen comme si on y était, là-bas c’est chez moi, en me concentrant je pense pouvoir distinguer Jeanne, ma femme, et mon petit Jean-François…vivement ce soir… »
Une multitude d’images se bousculait dans la tête d’Hervé. Toute sa jeunesse défilait, ses escapades, les parties de pêche avec ses copains, les plongées à marée haute sur le quai du Drellac’h, les courses en barques au fond du Croaë…
Michel Le Veyer, un ami d’enfance d’Hervé, tenait la taverne « Les Korrigans » en haut du port. Ici, se négociaient les contrats de transport suite à de nombreuses tractations, marchandages, entre les patrons de barques essentiellement Bretons, mais aussi quelques Anglais ou Espagnols, introduits et appréciés. A toute heure de la journée les cargaisons pouvaient suite à des échanges parfois musclés changer de navire ou de destination.
Hervé et Erwan firent leur entrée dans la salle animée d’un indescriptible brouhaha. Leurs yeux mirent quelques secondes à s’habituer à l’obscurité des lieux, toutefois, ils purent distinguer les mouvements des têtes qui se retournaient une à une et comme par enchantement les murmures remplacèrent le tohu-bohu initial…
ça sentait le respect !
C’est Michel, le patron des lieux, qui ranima la salle en lançant bien fort :
« Bravo Capitaine, Bravo Lieutenant »
La nouvelle de l’arraisonnement du BIG.CRAZY et l’arrestation de son capitaine Mickaël Blackson avaient déjà fait le tour de tous les ports Bretons.
Comme un seul homme, toute l’assistance se dressa, les applaudissements fusèrent, les hourras, les viva, les hip hip hip se mêlèrent.
Paulette et Soizic, les deux servantes sèchèrent leurs larmes avec leurs petits tabliers blancs… Quelle émotion !
Mickaël Blackson, depuis de nombreuses années, écumait la mer d’Iroise et la plupart des patrons de navires réunis dans l’estaminet avaient eu un jour ou l’autre à subir les affres de ce satané forban.
Il avait toujours réussi à déjouer les pièges tendus par les corsaires du roi munis de lettres de représailles et à se réfugier dans son antre situé au fin fond de l’Helford River, non loin du Cap Lizard.
Petit à petit, le calme s’était installé, par petits groupes les marins venaient saluer et féliciter Hervé et son lieutenant.
Le grand gaillard attablé au fond de la salle avait patiemment attendu son tour, il fut le dernier à se présenter.
Et là, à quelques pas de nos deux héros, il s’arrêta en pointant son index vers le capitaine.
Surpris, étonné, Hervé de Portzmoguer mit deux ou trois secondes à reconnaître son vis-à-vis.
« Sacrebleu !… Fanch Gonidec…quelle belle surprise ! »
Douze années s’étaient écoulées..
En septembre 1489, à l’époque où les Français « envahissaient » le duché de Bretagne, dans ce même port du Conquet, Jehan de Portzmoguer recherchait un embarquement pour son fils Hervé, âgé de 14 ans mais déjà bien déluré.
Le hasard fit que Mathieu Gonidec, patron de la Marie-Jeanne de Penmarc’h et marin expérimenté les rencontra sur le quai du Drellac’h.
Mathieu et Jehan sympathisèrent, c’est tout naturellement que Fanch, second à bord du navire de son père, fut chargé d’initier Hervé aux subtilités de la navigation.
Leur complicité s’affirma au cours de leurs pérégrinations.
Deux années suffirent, le jeune moussaillon débrouillard, passionné, enthousiaste prit rapidement du galon.
Au cours d’une rencontre portuaire animée, un soir de goguette, Hervé, le jeune marin ambitieux se fit enrôler comme lieutenant par le patron de la Fernande du Croisic, armée pour escorter les convois qui sillonnaient les mers du ponant.
L’année même où Anne de Bretagne fût sacrée Reine de France, le lieutenant Hervé de Portzmoguer prit goût au combat et amorça sa carrière militaire.
Douze années…déjà…une éternité…
Hervé retrouvant ses esprits s’adressa à la cantonade:
« Hé les amis, je vous présente mon maître, celui qui m’a appris à tenir debout sur un navire, à régler les voiles, à suivre un cap, à lire dans les nuages… »
« Oh, Basta ! Ça va, ça va, cesse d’étaler la pommade moussaillon… »
Sous les acclamations de l’assistance Hervé fit les derniers pas pour étreindre affectueusement Fanch Gonidec.
« Tournée générale » « Yec’hed mad.. »
Michel le patron des Korrigans se frottait les mains…
La soirée n’était pas terminée.
à suivre
Claude